Droits de succession internationaux : quelles lois, quelles taxes, quelles stratégies ?

Avocat fiscaliste à Paris – 20 ans d’expertise en successions transfrontalières

Résumé

  • Loi applicable : par défaut, la succession est régie par la loi du pays de la dernière résidence habituelle du défunt ; il est toutefois possible, par testament, d’opter pour sa loi nationale conformément au Règlement (UE) 650/2012.
  • Fiscalité française : la France taxe les biens situés en France et les héritiers ou donataires résidents sur les biens mondiaux (article 750 ter CGI) ; les droits varient de 0 % à 45 % selon le lien de parenté et les abattements.
  • Crédit d’impôt : pour éviter la double imposition, l’article 784 A CGI permet d’imputer l’impôt étranger payé sur un même actif, dans la limite des droits français exigibles.
  • Rôle décisif de l’avocat fiscaliste : il sécurise le choix de loi, optimise les abattements, coordonne les déclarations multijuridictionnelles et gère les contrôles ou contentieux éventuels.

 

Quelles règles de compétence et de loi applicable régissent une succession internationale en 2025 ?

  • Règlement UE 650/2012 : fixe la compétence du pays de la dernière résidence habituelle et empêche l’ouverture de procédures concurrentes ; il prévoit aussi la reconnaissance automatique des décisions entre États membres, ce qui accélère le règlement des successions intra-UE.
  • Option testamentaire pour la loi nationale : le défunt peut, de son vivant, désigner dans un testament authentique la loi de sa nationalité pour l’ensemble de sa succession ; cette disposition est particulièrement utile aux binationaux ou aux expatriés souhaitant maintenir la réserve héréditaire française.
  • Certificat successoral européen (CSE) : délivré par notaire ou tribunal, il prouve la qualité d’héritier et les pouvoirs du liquidateur dans toute l’UE ; il évite les légalisations et constitue un sésame pour les banques étrangères qui exigent une preuve rapide.
  • Biens hors UE : les immeubles situés dans un pays tiers restent soumis aux lois locales (ex. « probate » britannique) ; l’avocat coordonne alors plusieurs procédures parallèles pour harmoniser les actes et minimiser les conflits de compétence.

 

 

Quelle fiscalité française s’applique à une succession comprenant des biens ou héritiers à l’étranger ?

Situation

Droit de succession français

Crédit d'impôt (art. 784 A CGI)

Traité billatéral existant

Observations

Bien situé en France, héritier non-résident

Oui (barème 0-45%)

Non, bien taxé une seule fois

CGI art. 1736 IV


Droits exigibles dans els 6 mois du décès en France

Bien situé en France, héritier non-résident > 6 ans sur 10

Oui(art. 750 ter 3°)

Oui, dans la limite des droits FR

Variable


Attention à la preuve du paiement étranger

Bien et héritier tous deux hors France

Non, sauf retour en France de l'héritier avant 10 ans


CGI 1729 c)


Déclaration informative possible pour sécuriser la situation

Immeuble UE avec crédit d'impôt

Oui, crédit imputé euro pour euro

Oui

Oui

Convention prime sur l'article 784 A si plus favorable

Comment régler une succession internationale : quelles démarches ?

  1. Identifier les juridictions : recensez les pays liés au défunt (résidence, nationalités) et vérifiez les conventions fiscales de succession pour anticiper les éventuelles doubles impositions et obligations déclaratives.
  2. Recenser tous les actifs : établissez un inventaire détaillé (immobilier, comptes bancaires, titres, crypto, assurance-vie, parts de société) en précisant localisation, valeur au jour du décès et régime matrimonial impactant la propriété.
  3. Collecter les pièces officielles : actes de décès, certificats d’hérédité, actes de notoriété, apostilles ou légalisations, traductions certifiées ; ces documents sont indispensables pour chaque juridiction et peuvent prendre plusieurs mois à obtenir.
  4. Choisir la loi applicable : utilisez un testament ou un CSE pour démontrer la loi retenue ; si aucun choix n’a été fait, rapportez la preuve de la résidence habituelle via factures, bail, inscription consulaire afin d’éviter un contentieux de compétence.
  5. Calculer les droits : dans chaque pays, appliquez les abattements locaux, puis calculez en France l’éventuel crédit d’impôt ; un tableur comparatif permet d’ajuster les répartitions entre héritiers pour limiter la charge globale.
  6. Déposer la déclaration 2705-SD : elle doit être signée et envoyée au service des impôts français dans les 12 mois du décès hors France (6 mois si le décès a eu lieu en France), accompagnée du paiement des droits ou d’une demande de fractionnement.

 

Comment éviter la double imposition des droits de succession entre la France et un autre pays ?

  • Vérifier la convention applicable : la France a conclu 33 conventions couvrant l’Espagne, les États-Unis, le Royaume-Uni, etc. ; chaque texte précise la répartition du droit de taxation par type de bien (immeuble, actions, créances).
  • Appliquer l’article 784 A CGI : faute de convention, la France impute l’impôt étranger supporté sur le même bien dans la limite des droits français afférents ; il faut donc isoler la base imposée et fournir la quittance officielle.
  • Choisir la méthode d’imputation : la convention peut prévoir un crédit d’impôt égal ou une exemption avec progressivité ; l’avocat calcule l’option la plus favorable, notamment lorsqu’un pays tiers applique un taux marginal inférieur au barème français.
  • Conserver les justificatifs : quittances étrangères, attestations de valeur, traductions jurées, apostilles ; sans preuve, le crédit est refusé et vous payez deux fois. L’avocat organise une data-room sécurisée pour fluidifier l’échange avec les autorités.

 

Pourquoi faire appel à un avocat fiscaliste spécialisé en succession internationale ?

  • Optimisation patrimoniale : abattements, démembrement, création de trust ou de holding familiale permettent de réduire jusqu’à 50 % la base taxable ; l’avocat anticipe ces montages avant le décès ou propose, après coup, des options de partage fiscalement neutres.
  • Sécurisation juridique : rédaction des clauses testamentaires compatibles multi-pays, obtention de rescrits fiscaux confirmant le taux applicable, gestion des conflits de lois pour éviter les actions en réserve héréditaire concurrentes.
  • Défense et contentieux : préparation des réponses aux demandes de renseignements de l’ENR, représentation devant la commission de conciliation ou le Tribunal judiciaire en cas de rehaussement des droits ou de contestation du domicile fiscal.
  • Accompagnement logistique : obtention de NIF pour héritiers non-résidents, ouverture de comptes escrow pour sécuriser les fonds, coordination des transferts internationaux et vérification KYC pour éviter un gel bancaire tardif.

FAQ

Pourquoi la France me taxe-t-elle sur un bien reçu hors de France dans une succession internationale ?

La France applique l’article 750 ter CGI : si vous êtes résident français depuis au moins six ans sur les dix dernières années, elle peut taxer les biens mondiaux reçus, même lorsqu’ils sont physiquement situés à l’étranger. Ce droit de suite vise à empêcher les expatriations opportunistes.

Vous ne payez toutefois que la différence entre le barème français et l’impôt déjà acquitté dans le pays source, grâce au crédit d’impôt interne ou conventionnel, et uniquement si vous prouvez le paiement étranger par une quittance officielle traduite.

Comment calculer et imputer le crédit d’impôt article 784 A CGI pour une maison héritée à l’étranger ?

Déterminez d’abord la valeur nette taxable en France après abattements. Calculez les droits français correspondants (0–45 %). Comparez-les à l’impôt payé à l’étranger : si celui-ci est inférieur, la France prélève la différence ; s’il est supérieur ou égal, aucun droit français n’est dû.

Reportez le montant du crédit ligne F du formulaire 2705-SD et joignez la quittance de l’administration étrangère, munie d’une apostille ou d’une légalisation, pour obtenir l’imputation automatique lors de la liquidation.

Comment faire reconnaître en France un testament établi dans un autre pays ?

Faites authentifier le testament localement, puis obtenez soit une apostille (Convention de La Haye) soit une légalisation consulaire. La traduction doit être certifiée par un traducteur assermenté. Si le testateur résidait dans l’UE et qu’il a choisi sa loi nationale, inscrivez cette option dans le certificat successoral européen afin que le notaire français l’applique sans exequatur.

Pour un pays hors UE, l’avocat saisit le Tribunal judiciaire en procédure d’ouverture de testament étranger, afin d’obtenir un exequatur simplifié et rendre les dispositions exécutoires.

Glossaire & checklist

Résidence habituelle : Pays où le défunt vivait de façon stable et permanente.

Abattement : Somme déduite avant calcul des droits : 100 000 € en ligne directe.

Certificat successoral européen : Document reconnu dans l’UE prouvant la qualité d’héritier.

 

Checklist “5 réflexes pour une succession internationale sereine”

□ Vérifier la loi applicable et les conventions fiscales

□ Dresser l’inventaire complet des biens mondiaux

□ Obtenir CSE ou acte notarié local certifié

□ Calculer droits + crédits d’impôt avant tout transfert

□ Déposer la 2705-SD dans les délais et conserver les quittances

 

Aller plus loin

  • Article 750 ter CGI : champ d’application territorial de l’impôt français sur les successions.
  • Article 784 A CGI : mécanisme d’imputation de l’impôt étranger.
  • Règlement (UE) 650/2012 : choix de loi et certificat successoral européen.
  • Jurisprudence CE 2024 “XYZ” : limitation du crédit d’impôt lorsque la valeur taxable diffère entre États.