La Fraude Fiscale, c'est Quoi? Je risque Quoi?
Rédigé par Marc Uzan - - Aucun commentaireUne personne est coupable du délit de fraude fiscale lorsqu'elle s'est frauduleusement soustraite ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l'impôt.
Peu importe la nature du procédé utilisé : il peut s'agir notamment de l'omission de déclaration, de la dissimulation de sommes sujettes à l'impôt, de l'organisation d'insolvabilité ou d'autres manœuvres mettant obstacle au recouvrement de l'impôt, d'irrégularités comptables (omission volontaire d'écritures, ou passation d'écritures inexactes ou fictives au livre-journal). Mais l'infraction doit présenter un caractère frauduleux, ce qui suppose que son auteur ait été animé par une volonté de fraude.
La preuve du caractère intentionnel incombe aux parties poursuivantes, ministère public et administration.
Les sanctions pénales ne peuvent pas s'appliquer au contribuable qui a été déchargé de l'impôt par une décision juridictionnelle devenue définitive pour un motif de fond.
Elles ne peuvent s'appliquer, en tout état de cause, qu'aux cas les plus graves de dissimulation frauduleuse, eu égard au montant des droits fraudés, à la nature des agissements de la personne poursuivie ou aux circonstances de l'intervention.
La personne est passible, indépendamment des sanctions fiscales, d'une amende de 500 000 € et d'un emprisonnement de cinq ans.
Les peines sont portées à 3 000 000 € et sept ans d'emprisonnement lorsque la fraude a été commise en bande organisée ou réalisée ou facilitée au moyen :
- soit de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d'organismes établis à l'étranger ;
- soit de l'interposition de personnes physiques ou morales ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable (trusts ou fondations) établis à l'étranger ;
- soit de l'usage d'une fausse identité ou de faux documents, ou de toute autre falsification ;
- soit d'une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l'étranger ;
- soit d'un acte fictif ou artificiel ou de l'interposition d'une entité fictive ou artificielle.
Par ailleurs, l'amende de 500 000 € (ou de 3 000 000 €) peut être portée au double du montant du produit tiré de l'infraction (Loi 2018-898 du 23-10-2018 art. 23, applicable aux infractions commises à compter du 25-10-2018).
En cas de dissimulation, ces peines ne sont applicables que si la dissimulation excède le dixième de la somme imposable ou le chiffre de 153 €.
La durée de la peine d'emprisonnement encourue par l'auteur ou le complice de la fraude est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis d'identifier les autres auteurs ou complices.
À ces peines viennent s'ajouter :
- l'interdiction de participer aux travaux des commissions administratives des impôts, du comité des abus de droit et du comité consultatif du crédit d'impôt-recherche (application automatique ; CGI art. 1753) ;
- l'affichage et la diffusion de la décision de justice (prononcé obligatoire par le juge, sauf dérogation spécialement motivée en considération des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ;
- la privation de tout ou partie des droits civiques, civils et de famille énumérés à l'article 131-26 du Code pénal (prononcé facultatif par le juge ; obligatoire toutefois, sauf motivation spéciale, pour les fraudes commises en bande organisée ou facilitées à l'aide des moyens visés ci-dessus) ;
- l'interdiction d'exercer et la suspension du permis de conduire (prononcé facultatif) ;
- l'exclusion de la procédure de passation des marchés publics (prononcé facultatif).
Pour les personnes morales l'amende est, conformément à l'article 131-18 du Code pénal, égale au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques (montant porté au décuple en conséquence des dispositions de la loi du 23-10-2018 visées ci-dessus)
Les auteurs et les complices d'une même fraude sont tenus solidairement au paiement des droits fraudés et des pénalités, dès lors qu'ils ont tous fait l'objet d'une condamnation pénale définitive et que la solidarité a été prononcée par le juge pénal.
Autres types de délits
L'opposition individuelle ou collective au contrôle fiscal expose notamment son ou ses auteurs à des peines correctionnelles.
Il en est de même des infractions suivantes.
Refus collectif de l'impôt
L'organisation, par voies de fait, menaces ou manœuvres concertées, du refus collectif de l'impôt est punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 9 000 €. L'incitation du public au refus ou au retard de paiement de l'impôt est punie d'une amende de 3 750 € et d'un emprisonnement de six mois. Par ailleurs, le délinquant peut être exclu de la procédure de passation des marchés publics.
Escroquerie en matière de TVA.
Certaines fraudes relatives à la TVA, notamment celles qui tendent à constituer des crédits fictifs de taxe, relèvent de l'escroquerie et peuvent être poursuivies en application de l'article 313-1 du Code pénal.
Récidive en matière de taxes sur le chiffre d'affaires
Le contribuable ayant effectivement fait l'objet depuis moins de trois ans de certains types d’amendes ou majorations peut, s'il commet intentionnellement une nouvelle infraction de même nature, être frappé d'une peine d'emprisonnement de six mois prononcée par les tribunaux répressifs.
Organisation de fausses comptabilités par un professionnel
Les agents d'affaires, experts, experts-comptables et professionnels assimilés encourent une amende pénale d'un montant de 4 500 € et/ou un emprisonnement de cinq ans, s'ils participent à l'établissement de documents comptables falsifiés.
Divers.
Plusieurs infractions, autres que celles que nous avons déjà examinées, sont assorties de sanctions pénales par des dispositions particulières du Code général des impôts. C'est le cas, en matière d'impôts directs, de celles qui sont visées aux articles 1771 à 1783 B du CGI et dont la sanction, d'ailleurs, fait souvent double emploi avec la sanction du délit de fraude fiscale : défaut de déclaration séparée de revenus encaissés à l'étranger, encaissement de coupons revenant à des tiers, production de pièces fausses en vue d'obtenir un dégrèvement, etc. Autre exemple : les fausses affirmations de sincérité en matière de droits d'enregistrement (CGI art. 1837).